(Français) Le partenariat transatlantique risque d’accentuer les poursuites contre les États

ORIGINAL LANGUAGES, 17 Mar 2014

EurActiv – TRANSCEND Media Service

Des investisseurs réclament plus d’1,7 milliard d’euros à la Grèce, à l’Espagne et à Chypre. Le phénomène pourrait s’aggraver si l’accord du partenariat transatlantique avec les Etats-Unis était ratifié en l’état.

Le groupe d’action Observatoire de l’Europe industrielle (CEO) et le Transnational institute (TNI) ont publié le 10 mars [2014] un rapport intitulé “Profiter de la crise”,  alors que l’UE a entamé une consultation publique sur les conséquences réglementaires que pourrait avoir un accord entre l’UE et les États-Unis.

Le document révèle une « vague croissante » de poursuites juridiques lancées par des investisseurs spéculatifs touchés par les risques liés à la crise économique européenne contre les États membres en difficulté.

Une situation qui pourrait se solder, de nouveau, par une opération de sauvetage financée par des fonds spéculatifs…ceux-là même qui sont à l’origine de la crise qui frappe l’Europe.

Selon le rapport, nombre de ces fonds sont des «fonds vautours » à la recherche de retour sur investissement rapide et non d’investissements sur le long terme.

« Dans une période où les citoyens ordinaires de toute l’Europe se voient dépouiller de nombreux droits sociaux de base, il est pervers que l’UE soutienne un régime international d’investissement qui octroie une protection VIP à des investisseurs étrangers dont les pratiques sont avant tout spéculatives, » affirme Cecilia Olivet, coauteure du rapport.

Le rapport dresse une liste de plusieurs cas afin d’étayer ses accusations. À Chypre, l’investisseur privé grec coté en bourse Marfin Investment Group réclame actuellement 823 millions d’euros de dédommagement en raison des pertes entrainées par la nationalisation de la banque Laiki par le gouvernement chypriote.

La banque slovaque Poštová Banka a de son côté acheté de la dette grecque après que la valeur des obligations grecques a été abaissée. Même si une proposition généreuse d’une restructuration de la dette souveraine lui a été faite, la banque poursuit la République hellénique en vue d’obtenir un accord plus avantageux par l’intermédiaire d’un accord d’investissement bilatéral entre les deux pays.

En Espagne, le rapport indique que le coût des litiges portés par les investisseurs privés s’élève à plus de 700 millions d’euros. Une somme qui, outre des frais juridiques, devra être financée par les deniers publics.

Les détracteurs du Partenariat de commerce et d’investissement entre l’UE et les Etats-Unis (PTCI) craignent même que les sommes investies dans ces affaires puissent passer inaperçues en raison du principe énoncé par les clauses « de traitement juste et équitable » comprises au sein du partenariat transatlantique. Les investisseurs pourraient ainsi lancer des poursuites contre les États membres pour violation présumée de leurs « attentes légitimes » quant à la rentabilité de leurs investissements.

« Politiquement insensé »

« Les fonds spéculatifs utilisent déjà les accords d’investissement pour faire main basse sur les trésoreries exsangues des pays européens en crise, » explique Pia Eberhardt, militante de l’Observatoire de l’Europe industrielle. « Il serait politiquement insensé de donner à des entreprises multinationales les mêmes droits à travers un accord UE-USA qui se veut encore plus ambitieux », ajoute-t-elle.

Selon le rapport, 75 000 entreprises avec des filiales dans l’UE et aux États-Unis pourraient lancer des poursuites grâce aux dispositions contenues dans la proposition d’accord relatif au PTCI.

« Le risque est encore plus prégnant étant donné que les entreprises européennes et américaines savent très bien comment le système fonctionne, puisqu’elles sont à l’origine de la majorité (64 %) des litiges entre investisseurs et État au niveau mondial, » poursuit le document. « Les entreprises américaines, bien connues pour être procédurières, pourraient sortir la lame du fourreau pour combattre des réglementations qui ne leur plaisent pas de part et d’autre de l’Atlantique. »

Plus de la moitié des investissements directs étrangers au sein de l’UE serait concernée par le PTCI, d’après l’étude, dont une grande partie provient des sociétés cotées à la Bourse de Wall Street.

L’obstination dont font preuve les négociateurs américains et les craintes accrues du côté européen relatives aux éventuelles conséquences de l’accord sur les réglementations européennes ont mis temporairement les négociations transatlantiques en attente afin de pouvoir mener des consultations publiques.

Entre-temps, des cabinets d’avocat spécialisés dans les investissements, tels que le Britannique K&L Gates, ont déjà conseillé aux sociétés d’utiliser la menace des tribunaux d’arbitrage comme « outil de marchandage » dans le cadre des négociations sur la restructuration de la dette avec les gouvernements.

Le nombre de cas d’arbitrages est monté en flèche passant de 38 en 1996 à 450 en 2011, selon un rapport par l’Observatoire de l’Europe industrielle, avec un coût moyen de 8 millions de dollars (5,8 millions d’euros) par litige.

Un outil contre les gouvernements

La société Clyde & Co, située au Royaume-Uni, a également conseillé de recourir au potentiel que représente la mauvaise publicité qu’induirait une plainte déposée par des fonds d’investissement à l’encontre d’un État. Selon elle, une telle action serait un levier utile dans le cas d’un litige avec un gouvernement étranger.

Ces types de conseils émis par des cabinets juridiques renforcent la portée des avertissements lancés dernièrement par la commission de l’environnement du Parlement européen. Selon elle, les clauses relatives aux litiges entre investisseurs et États membres représentent un « risque réel » et viennent contrecarrer l’espace de liberté des États membres afin d’assurer les intérêts publics, y compris dans le domaine de l’environnement.

La société énergétique suédoise Vattenfall vient de lancer une procédure contre l’Allemagne pour sa décision de supprimer progressivement l’énergie nucléaire. Ce procès coûterait 700 millions d’euros.

De l’autre côté du débat écologique, 22 sociétés en Espagne – des fonds d’investissement privés principalement – ont poursuivi le gouvernement espagnol devant des tribunaux internationaux à la suite de sa décision de réduire les subventions relatives aux énergies renouvelables.

« Alors que les écologistes ont critiqué la réduction des subventions à juste titre, […] seuls les grands investisseurs étrangers ont la capacité de mener un procès et c’est monstrueux que, s’ils obtiennent gain de cause, ce soit au peuple espagnol, déjà en grande difficulté, de payer en vue d’enrichir ces fonds d’investissement, » selon le rapport.

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